CHRONOLOGIE

(source: http://www.urome.be)

A – Création de l’Association Internationale Africaine

1876 – Léopold Il prit l’initiative d’organiser, à titre privé et personnel, une conférence géographique internationale. Celle-ci se réunit sous sa présidence à Bruxelles en septembre 1876. L’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, la Russie et la Belgique y étaient représentées. Le Souverain, en ouvrant la séance, insista sur la nécessité de libérer l’Afrique de l’esclavage et d’y apporter la civilisation. Les débats aboutirent à la création d’un organisme nouveau: « l’Association Internationale Africaine ».  Celle-ci avait pour objectif la répression de la traite des noirs et l’ouverture de l’Afrique au commerce international.

Pour réaliser ses buts, l’Association se proposait d’organiser des voyages d’explorations et de créer des stations hospitalières et scientifiques; passant à la pratique, elle s’organisa en un Comité central, présidé par le Roi, et en divers comités nationaux.

Le Comité belge, financé par Léopold Il et par des souscriptions nationales, fut le plus dynamique. De 1877 à 1884 il organisa cinq expéditions à la tête desquelles on trouve Cambier, Popelin, Ramaekers, Storms, Becker et Durutte; c’est à cette époque que furent fondés, sur le lac Tanganika, les postes de Karema et de M’Pala.  Dès 1877, le Comité central de l’Association avait pris pour emblème le drapeau à étoile d’or, qui allait devenir plus tard celui de l’Etat Indépendant du Congo.

B – Créations successives du Comité d’Etudes du Haut-Congo et de l’Association Internationale du Congo

Mais tandis que le Comité belge de l’Association Internationale Africaine prenait ainsi pied en Afrique, les premiers plans du Roi étaient bouleversés par un événement décisif: la descente du fleuve Congo par Stanley. Léopold Il saisit tout de suite l’immense portée de cette découverte. Aussi, lorsque, rentrant au pays, Stanley débarque à Marseille en janvier 1878, il y trouve deux délégués du Souverain; cependant, l’explorateur décline d’abord les offres qui lui sont faites. Ce n’est que plus tard, lorsqu’il n’aura rencontré qu’indifférence auprès des gouvernements anglais et américain, qu’il se tournera vers Léopold Il.

Dès ce moment, le Congo entre dans l’histoire contemporaine. Des expéditions vont étudier le pays, on va y bâtir des centres civilisés, y lancer les premiers bateaux, y tracer les premières routes. De la collaboration entre Stanley et Léopold Il va naître le Congo d’aujourd’hui.

Une première entrevue entre le Roi et le voyageur a lieu en juin 1878; on y jette les bases de l’action future, et dès la fin de l’année, en novembre, est constitué, avec la collaboration d’hommes d’affaires, un « Comité d’Etudes du Haut-Congo ».

Les buts déclarés de ce Comité sont d’ordre commercial: il s’agit de rechercher les moyens de mettre en communication facile le Bas et le Haut-Congo; en effet, les deux secteurs du fleuve sont séparés par une série de chutes et de rapides infranchissables qui opposent un obstacle à un trafic économique. Il faut trouver la voie qui contournera cet obstacle; il faut ensuite lancer sur le fleuve une flottille et fonder des postes qui seront autant de relais.

La première expédition organisée par le Comité prend le départ en 1879; elle est commandée par Stanley qu’accompagne une équipe d’officiers belges; parmi ceux-ci, se trouvent Cambier et Hanssens qui par la suite relaieront Stanley à la tête des opérations. Les résultats sont rapides: en trois ans, trente postes sont fondés et, parmi eux, Léopoldville; une route est tracée, et sur cette route, à dos d’hommes, sont transportés en pièces détachées les premiers steamers qui seront lancés, à Léopoldville, sur l’énorme bief navigable du fleuve. En même temps, l’exploration du pays s’organise, et des traités sont passés avec les chefs indigènes. Ces traités, qui ont un caractère de suzeraineté et de commerce, accordent aux nouveaux venus le droit d’occupation des terres. En fait, plus tard, c’est la validité de ces traités, internationalement reconnue, qui allait consacrer les droits acquis sur les territoires africains.

Cependant, au-delà des buts avoués du Comité, Léopold Il pensait déjà à la création d’un Etat dans le bassin du Congo. Ce dessein apparaît clairement dans des instructions secrètes remises à Stanley en 1879: ces instructions portent précisément sur les traités à passer avec les chefs indigènes et elles découvrent le projet du monarque d’acquérir la souveraineté des territoires parcourus et de constituer progressivement une confédération dont il serait le Souverain-Fondateur.

La réalisation de ce projet de créer un Etat souverain allait s’accélérer grâce au remplacement du Comité d’Etudes par un organisme nouveau. En effet, le Comité d’Etudes du Haut-Congo après quelque temps s’était dissous pour des raisons financières, et Léopold Il l’avait remplacé par un autre instrument, plus souple, sur lequel il avait des pouvoirs beaucoup plus étendus: I' »Association Internationale du Congo« . C’est au nom de cette nouvelle association que continua l’occupation progressive du pays; c’est elle qui allait bientôt engendrer l’Etat Indépendant du Congo.

C – Création de l’Etat Indépendant du Congo

L’Association Internationale du Congo manifesta, sous la haute direction de Léopold Il, une vitalité surprenante. Une poignée d’hommes était enfin parvenue à surmonter l’obstacle que depuis des siècles les rapides du fleuve opposaient à toute pénétration venue de l’Atlantique; en quelques années, les expéditions s’étaient multipliées et ramifiées à l’intérieur du pays; un courant commercial avait été amorcé; des communications avaient été établies jusqu’aux zones les plus reculées. Dès 1885 l’Association enregistrait à son actif, outre le lancement d’une flottille de cinq steamers, la fondation d’un réseau de quarante postes qui couvrait près de la moitié du Congo actuel et, surtout, un total de plus de cinq cents traités de suzeraineté passés avec les chefs indigènes.

Les grandes nations observaient avec attention ce travail réalisé sous l’impulsion du Souverain d’un petit pays neutre. En même temps, elles s’épiaient entre elles car leurs convoitises portaient aussi sur cette région de l’Afrique. L’entrée du Roi des Belges sur la scène internationale pouvait leur apporter une solution qui permettrait de ne pas détruire le précaire équilibre des forces réalisé en Europe à la fin du siècle dernier.

Léopold Il sut tirer parti de cette situation: il sut à la fois utiliser avec habileté les rivalités qui opposaient entre elles les grandes nations et imposer à l’attention du monde l’importance du travail réalisé en Afrique sous son impulsion. Après avoir déjoué les prétentions portugaises sur l’embouchure du fleuve, il fait reconnaître la validité des traités passés avec les chefs autochtones, il signe, au nom de l’Association, des conventions internationales avec la France, avec l’Allemagne; enfin, le 22 avril 1884, pour la première fois, une grande puissance – en l’occurrence les Etats-Unis – reconnaît officiellement l’Association Internationale du Congo comme un Etat souverain. Dès ce moment, les événements vont se précipiter.

L’Allemagne, devant les répercussions internationales que pouvait avoir la pénétration européenne en Afrique centrale, prend l’initiative de réunir les représentants de quatorze pays. La conférence de Berlin va siéger pendant plus de quatre mois, du 15 novembre 1884 au 26 février 1885. Dès le 23 février, les jeux sont faits: la qualité d’Etat-Souverain est reconnue unanimement par les nations à l’Association Internationale du Congo, et c’est en cette qualité que celle-ci, trois jours plus tard, signe avec les autres pays, l' »Acte Général de Berlin » qui porte sur le bassin conventionnel du Congo occupé, non seulement par l’Association, mais aussi par les Français, les Portugais, les Anglais, les Allemands et les Italiens. Le nouvel Etat était compris tout entier dans l’aire de ce bassin conventionnel.

L’Acte Général de Berlin consacrait la suppression de la traite des nègres et l’obligation d’améliorer les conditions morales et matérielles de la vie des indigènes; il faisait oeuvre originale en imposant en outre un régime économique basé sur une certaine internationalisation et une adhésion radicale au libre échange: dans le bassin conventionnel du Congo, le commerce était libre pour tous les pays, ce qui excluait tout monopole, tout traitement différentiel à l’égard des navires comme à celui des marchandises.

Léopold Il voyait ainsi reconnue l’existence de l’Etat africain qu’il avait voulu créer.

La Belgique consacrait bientôt la nouvelle position de son Roi. En effet, dès avril 1885, le Parlement autorise Léopold Il à être le chef du nouvel Etat fondé en Afrique, tout en stipulant que l’union entre la Belgique et cet Etat reposera exclusivement sur la personne du Souverain.

Le 29 mai 1885, un décret changeait l’appellation de I’ « Association Internationale du Congo » en « Etat Indépendant du Congo ».

Le 19 juillet 1885, proclamation solennelle de l’avènement au trône de Léopold Il en qualité de souverain de l’Etat Indépendant du Congo était faite à Banane, au Congo même, et le 1er août suivant, notification en était donnée à toutes les puissances.